PODCAST. Le 19/10/2020. Dans cet épisode, nous nous intéressons à l’effet des récessions sur le bonheur. Il ne vous aura pas échappé que nous allons connaitre cette année une baisse quasi sans précédent du PIB, avec pour la France un recul qui, en l’état actuel des choses, devrait se situer entre -8% et -10% par rapport à 2019. Donc il me parait plus judicieux de vous parler des effets des récessions sur le bonheur que des effets de la croissance.

Durant les récessions, on observe sans grande surprise généralement une baisse du niveau général de bonheur, plus précisément une baisse de la satisfaction de la vie, c’est-à-dire la note que les gens donnent eux-mêmes à leur vie lorsqu’on leur demande de l’évaluer.
Si la baisse est réelle pendant les récessions, elle est toutefois moindre que ce que l’on pourrait imaginer et surtout elle n’est pas systématique.
Prenons l’exemple de la crise financière de 2007-2009 qui a débouché sur la Grande Récession. A posteriori, on a pu observer que l’impact de cette très grave crise financière et économique avait été très différent selon les pays. On peut en fait distinguer, au sein des pays développés, trois groupes de pays
- Ceux qui ont connu une baisse forte de la satisfaction de la vie : les pays méditerranéens, l’Irlande et les Etats-Unis
- Ceux qui n’ont pas connu d’effet significatif > la plupart des pays d’Europe de l’Ouest, dont la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni
- Et enfin, un groupe beaucoup moins fourni, les pays qui ont enregistré une hausse significative de la satisfaction de la vie à la faveur de la crise : le Japon et surtout la Corée du Sud
On connait bien les facteurs contribuant à la baisse du bonheur durant les récessions
Il y a d’abord, évidemment, les facteurs économiques. Les récessions sont marquées par une baisse des revenus pour de nombreuses personnes, les indépendants mais aussi les salariés qui font moins d’heures supp, et touchent moins de participation, d’intéressement et de bonus. Les récessions entraînent aussi une baisse de valeur des patrimoines boursiers et parfois immobilier, entraînant un sentiment d’appauvrissement. Elles occasionnent aussi une baisse de la consommation en poussant les ménages à augmenter leur épargne de précaution. Quand l’activité baisse, on s’octroie moins de petits plaisirs, ce qui peut plomber un peu le bonheur.
Et puis il y a, évidemment, la hausse du chômage. C’est là le principal vecteur de dégradation du niveau de bonheur général d’un pays pendant les récessions. S’il est un résultat consensuel de l’économie du bonheur, c’est bien celui qui touche à l’impact fort et durable du chômage sur le bonheur. La satisfaction de la vie est significativement plus basse pour les chômeurs que pour les actifs occupés partageant les mêmes caractéristiques socio-économiques. Perdre son emploi réduit la satisfaction de la vie davantage qu’aucun autre événement de la vie ou presque. Il y a un effet véritablement dévastateur du chômage qui dépasse la seule perte de revenus. Une étude évalue ainsi que la perte de revenus n’explique qu’un quart de la perte de bien-être consécutive à la perte de son emploi. Le reste est à rapprocher d’une raréfaction des relations sociales, de la perte de statut, de la dégradation de l’estime de soi, de l’ennui au quotidien…